"Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ?" (Mt 27, 46)
Une des dernières paroles de Jésus en croix ! Le Fils est désespéré ; son Père l'abandonne. Incompréhensible ! Un père n'abandonne pas son fils au moment où il a le plus besoin d'amour.
Jésus avait enseigné à l'avance au temple : Quand vous aurez élevé le Fils de l'homme, alors vous comprendrez que JE SUIS … Celui qui m'a envoyé est avec moi ; il ne m'a pas laissé seul parce que je fais toujours ce qui lui plait. " (Jn 8 , 28-29)
Le même Jésus enseigne que le Père ne le laissera pas seul quand les hommes l'auront élevé, et une fois élevé, il se dit abandonné par son Père.
Contradiction ! Contradiction qui annonce du neuf.
Le Père n'abandonne pas l'homme Jésus, il abandonne le corps périssable du Fils de l'Homme, du Fils d'Adam, que Jésus va aussi abandonner sur la croix devant un public nombreux.
Jésus est l'homme parfait. Il n'est pas créé à partir de la poussière ; il vient du ciel ; il a été engendré ; il a pris un corps parfait dans le sein de la Vierge Marie. (cf. art. 219)
Paul explique que le corps humain charnel n'a pas de part au ciel, qu'il existe aussi un corps spirituel, celui du ressuscité : "Ce qui est semé est un corps humain, ce qui est ressuscité est un corps spirituel… Puisqu'il existe un corps humain, il existe aussi un corps spirituel" (1 Co. 15, 44 ),et encore : "La chair et le sang ne sont pas capables d'avoir part au Royaume de Dieu et ce qui est périssable n'a point part au monde impérissable."(I Co 16, 50)
Jésus n'a pas pris, dans le sein de Marie, un corps charnel, imparfait et périssable : il a pris un corps parfait impérissable.
Ce corps spirituel ne peut ni souffrir, ni mourir puisqu'il est parfait et impérissable. Pourtant, Jésus a souffert et est bien mort ; il n'a pas fait mine ; il n'a pas triché.
Alors ?
Paul nous dit souvent dans ses épîtres la nécessité de revêtir le Christ. (Ga 3, 27)
Jésus nous l'a dit aussi en parabole : "Le Royaume des cieux est semblable à un roi qui célébrait les noces de son fils … il vit un homme qui ne portait pas le vêtement de noce, et lui dit : Mon ami, comment es-tu entré ici, sans avoir le vêtement de noce ? L'autre garda le silence. Alors le roi dit aux serviteurs : Jetez-le, pieds et poings liés, dehors dans les ténèbres." (Mt 22, 1-14)
Pour assister aux noces, il faut revêtir le vêtement blanc, le Christ. De même, Jésus a revêtu l'homme. Par-dessus son corps spirituel, il a revêtu l'homme charnel, pécheur, souffrant et mortel.
En revêtant l'homme, il s'est chargé de nos souffrances et de nos péchés : "En fait, ce sont nos souffrances qu'il a portées, ce sont nos douleurs qu'il a supportées, et nous, nous l'estimions touché, frappé par Dieu et humilié. Mais lui, était déshonoré à cause de nos révoltes, broyé à cause de nos perversités… Dans ses plaies, se trouvait notre guérison." (Es 53, 4-5)
Le corps charnel que Jésus a revêtu par-dessus son corps parfait est abandonné par le Père et par le Fils : il est mort sur la croix et avec lui sont morts nos souffrances, nos péchés et notre mort elle-même ; nous sommes devenus impérissables et parfaits.
Le Verbe Lumière a créé l'homme imparfait : imparfait parce que libre de choisir le mal, imparfait parce que périssable.
Le Verbe s'est incarné, et il est mort sur la croix pour terminer son œuvre, et rendre impérissable et parfaite, la création qu'il a primitivement créée périssable et imparfaite : "Oui, tu es poussière et à la poussière tu retourneras." (Gn 3, 19)
Sur la croix, le Père et le Fils abandonnent le périssable, le corps du Fils de l'Homme.
A la semaine prochaine.